Afrique : La part décroissante du continent dans l’aide publique au développement

La Fondation Mo Ibrahim, à travers son rapport « Faits & Chiffres 2025 : Financer l’Afrique que Nous Voulons », alerte sur une baisse inquiétante de la part de l’Afrique dans l’aide publique au développement (APD) mondiale. En dix ans, cette part a reculé de 11 points, illustrant un désengagement progressif des bailleurs historiques. Ce constat soulève des interrogations majeures sur la volonté internationale de soutenir un continent pourtant confronté à des défis structurels importants, et ce, alors même que sa croissance démographique et ses besoins sociaux explosent.
Le rapport pointe du doigt l’inadéquation du système financier multilatéral, incapable de fournir à l’Afrique un financement concessionnel à long terme. En matière de finance climatique, le déséquilibre est encore plus frappant : bien que le continent ait besoin d’un soutien financier annuel compris entre 1,6 et 1,9 milliard de dollars pour répondre à ses besoins climatiques, il ne reçoit qu’une fraction – moins de 3 % – des fonds alloués aux pays en développement. Cette marginalisation dans les circuits de financement limite la capacité de l’Afrique à investir dans des solutions durables et résilientes.
Par ailleurs, les indicateurs économiques soulignés dans le rapport dressent un tableau préoccupant. La dette publique extérieure de l’Afrique a presque doublé en dix ans, atteignant 690 milliards de dollars, tandis que le ratio dette/PIB du continent est désormais le plus élevé au monde. À cela s’ajoutent des pertes annuelles estimées à 90 milliards de dollars en raison des flux financiers illicites, une somme qui annule pratiquement l’effet bénéfique de l’APD. Cette situation entrave gravement les efforts en matière d’emplois, d’infrastructures et d’atteinte des Objectifs de développement durable (ODD), dont seuls 6 % seraient en voie de réalisation d’ici à 2030.
Pourtant, les potentiels du continent sont immenses. L’Afrique détient 60 % du potentiel mondial d’énergie solaire, 65 % des terres arables encore non cultivées, un littoral largement inexploité au fort potentiel économique, ainsi que de vastes réserves minières. Le rapport plaide pour une mobilisation accrue des ressources internes, une valorisation des chaînes de valeur locales et une meilleure intégration continentale pour créer un environnement favorable à l’investissement. Alors que le Forum Ibrahim 2025 s’ouvre à Marrakech, ces constats appellent à un sursaut collectif afin de repenser les mécanismes de financement et de libérer pleinement le potentiel africain.
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Saliou KALY